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L'amour des Paysages

« On est de son enfance comme on est de son pays ».

Saint-Exupéry

Les paysages que nous chérissons sont l’une des nombreuses « madeleines » qui, à la fois, nous poursuivent depuis l’enfance et nous ont forgé notre « culture paysagère », du moins un certain rapport au dehors, à l’espace.

Alors que notre personnalité est façonnée par notre éducation et par une culture familiale centrée sur le quotidien, notre culture paysagère faite de saveurs et d’odeurs nous constitue doucement, plus discrètement.

Ci-dessous quelques paysages que je chéris (une trentaine d'images des plateaux Jurassiens avant de descendre dans les vallées un peu plus tard).

L’éveil au paysage emprunte les chemins les plus variés. En même temps que le temps des vacances, enfant, souvent j’entrais (les enfants entrent toujours) en paysage par les livres. Certains d’entre eux ont eu un succès durable à mes yeux : L'Appel de la forêt et Construire un feu de Jack London, Moby Dick d’Herman Melville, Sans famille d’Hector Malot, etc.

Par procuration, je m’identifiais aux personnages héros-voyageurs, j’y découvrais autant des paysages, des provinces que des pays. Bien au-delà de l’adolescence, ces lectures et l’imprégnation des illustrations qui les prolongeaient m’ont accompagné longtemps. Les Atlas de géographie ont également été des compagnons de route.

Pour moi tous ces ouvrages ont écrit mon grand livre de mes paysages, à la façon d’un livre des merveilles, avec ses collines et ses falaises, ses infinis, les violences et les repos de ses mers, les nuages, les abîmes montagnards.

Le casse-cailloux : un fléau pour les pâturages du Jurassiens.

Les pâturages du Jura avec leurs bosses caillouteuses et leurs creux sont vraiment une spécificité de nos paysages. En plus de leur beauté intrinsèque, ils offrent des habitats riches en espèces de toutes sortes. Sur ces endroits, il s’y pratiquait une culture extensive qui permettait de conserver une certaine richesse floristique et faunistique. Mais l’intensification des pratiques agricoles a changé la donne. Les méthodes sont nombreuses, mais l’utilisation du casse-cailloux pour y pratiquer du "girobroyage" reste la plus brutale par ses effets irréversibles.

 

En peu de temps, les bosses, les affleurements rocheux et autres éléments karstiques, les haies, les murs et "murgers" si importants pour la biodiversité sont éliminées et le terrain complétement lissé. Bien que les premiers cas de "girobroyage" datent depuis longtemps (année 1990), cette pratique s’exerce, aujourd’hui, de plus en plus (pas loin d'une centaine de dégâts pendant le confinement au printemps 2020).

 

Mais de nombreuses personnes montrent un attachement fort à ce type de paysages si caractéristique de notre massif Jurassien et se mobilisent pour que cesse cette destruction. Un collectif de défense des paysages Jurassiens qui regroupe plusieurs associations régionales c'est créé en automne 2017. Pour plus d’informations vous pouvez aller consulter leur site.

Collectif « Pour les Paysages du massif Jurassien »

 https://paysagesjurassiens.wixsite.com/monsite/

Cela devait arriver, je suis malade…

Avec toutes ces atteintes aux paysages qui font ma vie (arasement des affleurements rocheux, comblement des dolines, suppression des haies, disparition des fermes Comtoises de caractères, etc. ), j’ai contracté la « solastalgie ».

Attention, cela est plus grave que le Covid19 et je pense qu’il n’y aura pas de vaccin avant longtemps.

 

Qu’est-ce que la « solastalgie » ?

Cela désigne la détresse causée par le sentiment de désolation provoqué par la dégradation de son environnement proche et de son territoire. Le mot est construit sur le modèle du mot « nostalgie », le mal du pays que l’on éprouve lorsque l’on est éloigné de chez soi. La « solastalgie » est le mal du pays éprouvé lorsque l’on est toujours chez soi mais que l’environnement est dévasté.

Ce terme a été inventé par Glenn Albrecht (Australien) et utilisé dans son excellent livre qui vient de sortir aux éditions Les Liens qui Libèrent : « Les Emotions de la Terre ».

 

Je ne pense pas que je guérirai de cette état… il est trop tard, les atteintes irrémédiables aux paysages de ma région, que je chérissais tant, ont été trop conséquentes

Paysages d'ailleurs

Tout pays étranger peut devenir une patrie. « Il ne faut pas, écrit Philippe Jaccottet, que l’attachement à un lieu donné devienne de l’étroitesse d’esprit ». Il y a tant de manières autres qu’héritées, tant d’occasions, de moments de la vie pour découvrir "son" propre paysage, "ses" propres paysages !

Le paysage s’apprend aussi à travers ces expériences.

Ci-dessous quelques paysages qui m'ont enchanté au cours de mon dernier voyage en Chine en avril 2019.

Une forêt vierge, comme celle que j’ai vu au pays des grands pandas en Chine, est pour moi un mélange d’émerveillement sans fin devant la force et la beauté de la nature et de tristesse devant sa destruction toujours croissante par l’être humain. Il est difficile en Europe d’en prendre la mesure : notre environnement naturel y a été modifié depuis six mille ans et pour nous, les prés, les champs et les plantations d’arbres que nous nommons « forêts » semble tout à fait normaux, alors qu’ils représentent un stade avancé de dégradation de la végétation existant avant les défrichements néolithiques. Nous ne nous en émouvons donc guère. Au Sichuan, en revanche, le contraste entre laideur des paysages transformés par l’homme et la splendeur de la nature dans toute sa diversité est criant : nul ne peut y rester insensible.

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